C'est l'histoire d'une petite princesse née dans l'extraordinaire ville de Paris. Paris qui fait rêver. Paris et sa Tour Eiffel. Paris et sa gastronomie. Paris et ses quartiers chics. On pourrait sûrement écrire des pages et des pages encore sur les merveilles de la capitale française, mais là n'est pas le sujet. La petite Nina fut dès sa naissance beaucoup choyée par ses parents. À la limite du pourri gâté. Ils avaient toujours un regard émerveillé pour leur fille qui devenait de plus en plus insupportable, de plus en plus hautaine et détestable. Chaque chose qu'elle commandait lui était servi sur un plateau d'argent. Elle pouvait tout choisir, tout demander, tout était accepté. Aucune limite. Quoique le compte en banque de ses parents lui permettait bien des folies. La progéniture de ces riches avocats avait eu la chance de naître dans les beaux quartiers de la métropole. Peut-être même dans l'une des plus belles demeures aussi. D'ailleurs, dans ce palace, dans le bureau de Monsieur Martin, il y a un cadre avec un immense cliché à l'intérieur, mis en valeur par la bordure dorée qui l'entoure. Toute la famille y est représentée, dans le fond, le ciel est bleu, l'arbre en fleur, ils sourient. Le décor est parfait, pas une seule ombre au tableau. Pas encore. Puisque, quelques mois plus tard, alors que Nina n'avait que six ans, on lui découvre un cancer. Évidemment, personne ne s'en rendu compte d'un coup. Elle avait eu les symptômes, les uns après les autres : palpitations, essoufflements, saignements de nez, ecchymoses, maux de tête, vomissements, troubles de la vue. Et les résultats de la prise de sang furent sans appel. Une leucémie. Dans certaines familles, ça soude les membres les uns aux autres pour affronter la maladie, et puis, dans celle-ci ça brise les liens. Charles Martin, ne pouvait définitivement pas accepter que quelque chose puisse briser le bonheur qu'il s'était efforcé de construire. Alors, il s'enfermait dans son bureau, presque nuit et jour. Et personne ne savait réellement ce qu'il faisait. Sa femme, Edith, quant à elle, tentait tant bien que mal d'assurer la perfection qu'incarnait leur famille. Et elle en offrait toujours plus à sa fille. Cette dernière demandait d'ailleurs souvent que ce faisait son père dans cette pièce que jamais elle n'avait pu visiter, et sa maternelle, pour protéger son innocence lui assurait qu'il créait quelque chose d'immense et de magnifique pour elle. Jamais elle ne put comprendre ce que cela voulait dire en réalité, son état se dégradait de jour et jour, si bien qu'elle fut obligée de rentrer à l'hôpital. À peine un mois plus tard, le corps de la fillette était protégé par quatre planches en bois. Sa chambre rose ne bougea pas, et devint un véritable temple, fermé à double tour. Personne n'y avait accès, les époux Martin eux-mêmes s'interdisaient d'y pénétrer.


Seulement, neuf mois plus tard, il fallut ouvrir la pièce qui sentait le renfermé, chaque meuble était recouvert d'une couche plus ou moins épaisse de poussière. La chambre n'avait rien perdue de sa vivacité et c'était comme si Nina allait pousser ses parents dans l'entrée pour qu'elle puisse retrouver ses poupées et peluches, ce qu'elle ne fit pas. Ses parents vendirent tous les jouets et autres objets qui avaient appartenu à leur fille unique et en rachetèrent de nouveaux. Pourquoi avoir si soudainement tout remis à neuf ? Un « heureux » événement. Pas si heureux que ça, puisqu'à l'annonce de la grossesse de Madame Martin, c'est une mine désenchantée qui s'afficha sur les visages des avocats, en parfait contraste avec l'expression réjouie du médecin qui annonçait la nouvelle. Aussi, ce dernier ne compris pas très bien leur réaction. Ce nouvel enfant serait plus qu'une torture pour ses géniteurs. Ça serait comme revoir à chaque instant la fille qu'ils avaient perdu avec la maladie.
À la naissance de leur deuxième enfant, le supplice fut encore plus grand. Le bébé, qu'ils décidèrent d'appeler Zoé, ressemblait comme deux gouttes d'eau à Nina. De grands yeux bleus, des cheveux très blonds, et puis plus tard, le même sourire, et la même voix. C'était comme s'ils avaient recopié Nina. Ne le supportant pas, Charles et Edith engagèrent dès les premiers mois de l'enfant, une gouvernante, qui s'occuperait d'elle comme une seconde mère. Cette nourrice passa très vite dans le rôle de la « mère principale » puisque la génitrice de la petite blonde la reniait, ainsi que son père. Elle vivait comme une orpheline. Et ce fut pas très bon pour son futur. Dès son entrée au collège, elle montrait un fort intérêt pour l'art, pour les autres matières, il en était autre chose. Elle tenait souvent tête à ses professeurs qui tentaient vainement de trouver une explication à son comportement et qui convoquaient souvent Monsieur et Madame Martin, qui ne venait jamais à aucun des rendez-vous. Constamment, elle était au cœur des bagarres et était devenue une habituée des salles de colle. Lorsqu'elle entra en seconde, sa conduite n'avait pas changé, toujours aussi douée pour l'art, mais toujours aussi agressive, elle commença à fumer. Ses tenues vestimentaires se résumaient à des jeans troués, des t-shirts à l'effigie de plusieurs groupes de rock, et des chaussures de militaires. Elle faisait un peu tâche dans son lycée de bourgeois, et ses vêtements non appropriés étaient dans la liste des raisons pour lesquelles elle était collée.


À ses dix-huit ans, elle a quitté le domicile familial avec une certaine peine pour sa gouvernante qui était devenue sa véritable mère. Elle a emménagé à Londres pour entrer dans le Royal College of Art pour des études d'art. Sûrement grâce à la généreuse somme d'argent qu'avaient du donner ses parents biologiques mais néanmoins absents, pour que leur fille qui les faisait tant souffrir, abandonne la capitale française, et quitte définitivement leur vie. Ils n'avaient eu besoin de la prier, et ses valises étaient prêtes avant même qu'ils n'aient eus le temps de réserver les billets d'avions.
Bref, chaque semaine, elle téléphonait encore à sa mère affective, et la rassurait sur sa vie en Angleterre. Sur ses études, ses relations, son travail. En parlant de travail, elle était serveuse dans un bar miteux pour se payer un appartement convenable, elle n'avait pas renoncé au confort, et aussi pour ses achats de drogue. En ce qui concerne son look, elle s'habille désormais avec des robes, des vêtements qui la mettent en valeur, elle se maquille, porte des bijoux et change de couleur de cheveux comme de vêtements. Son départ pour Londres était un nouveau départ, mais elle n'en oublie pas son ancienne vie, ni son caractère et ses goûts, la jeune artiste se donne tout simplement une meilleure apparence. Une apparence qui en cache pourtant beaucoup.