- Il se pourrait que mon histoire soit des plus banales. Il se pourrait que ma vie soit comme tous les jeunes londoniens qu'il m'était offert de pouvoir croiser. Il se pourrait que mon histoire soit comme toutes celles de tout les autres adolescents. Une vie terne et sans histoire.
- Ma vie se résumait à sortir de mon lit, aller en cours, aller à la cafète pour le déjeuner, aller aux toilettes, car oui comme tout Homme avec un grand H, je n'ai pas une vessie de quarante mille litres. Je devais ensuite retourner en cours, mater les filles, draguer les filles, rentrer chez moi, faire mes devoirs, manger, me doucher, pisser, me brosser les dents, puis aller dormir. Et le week end ? Je les passais soit à regarder la télévision, soit voir mes amis, soit faire mes devoirs. Et la nuit ? Soit je restais chez moi à filmer mes parents en pleine crise de couple, soit je sortais pour draguer les filles en soirée.
- En plus de ça, il faut dire que je suis célibataire, pendant que mes amis sont toujours main dans la main avec quelqu'un, moi je suis tout seul, pendant que les autres s'aspirent la bouche comme si leur vie en dépendait, moi j'étais tout seul. Et pendant les sorties le week end en bande, pendant qu'ils étaient avec leur copine, moi, j'étais encore tout seul...
Je coupais la caméra en laissant échapper un soupir. Une triste vie d'ado seul, voilà ce que représentait mon journal vidéo. Et pourtant, je n'étais pas triste pour autant, dans la vie, j'avais tout ce dont j'avais besoin, un grand appart, malgré le fait que cet appartement soit collé à celui de mes parents. Un chat, à manger, des amis, j'avais tout. Le seul côté négatif de ma vie était le célibat, mais réfléchissez un instant qui voudrait d'un garçon toujours scotché à sa caméra et une tête aussi bizarre que la mienne. Je ne sais pas pourquoi, j'ai toujours cet air d'homme frigide peint sur la figure...
Je me dirigeais vers la porte d'entrée, puis ferma la porte derrière moi, je fis un pas en avant, puis deux, puis trois, et arriva finalement sur le paillasson des voisins d'en face au quatrième pas. je toquais trois fois pour leur signaler ma présence. J'allumais ma caméra, la posa sur l'épaule, alors que la porte s'ouvrait, laissant apparaître une femme d'une quarantaine d'année fort bien vêtue et le sourire aux lèvres.
- Erwan coupe ceci veux-tu ?
- Non désolé maman, je ne peux pas, ma caméra est ma raison de vivre, elle représente ma vision du monde tu vois ?
- Oui bien, que veux-tu ?
- Je n'ai plus de nouilles, il en reste certainement ici ? Tu peux m'en passer sil te plait ?
- Entre je vais te les chercher.
- Merci bien.
Alors que je me dirigeais au salon, je me suis demandé où avait pu bien passer ma figure paternel, à cette heure ci, d'habitude, mon père était toujours vautré sur le canapé, à siroter une bière et à regarder la télévision. Je me suis dirigé lentement vers le bureau, puis pénétra dans la pièce. Il n'y avait personne. Je me suis avancé vers la table à côté de la fenêtre puis m'installa sur le vieux fauteuil en cuir. Enfant, et encore maintenant, je n'avais pas le droit de m'asseoir dessus, sous peine de me prendre une fessée. J'ai posé ma caméra sur la table, puis remarqua tout un tas de photos. Dont l'une, qui était celle d'un garçon de mon université.
- Qu'est-ce que...



- Souvenez-vous, j'avais dit l'autre jour que je n'avais pas une vie extraordinaire, bien que ça n'ait pas réellement changé, je tiens à dire qu'il y a tout de même un peu de piment dans ma vie d'ado solitaire. L'autre jour, en allant chercher des nouilles chez mes parents, je suis allé dans le bureau de mon père... Je me suis même assis sur LE fauteuil. Bref, ce n'est qu'un détail de ma folle escapade. Je tiens à dire que c'est un secret, et que personne ne doit savoir que je le sais. Mais j'ai découvert une photo d'un gars, il doit avoir mon âge je pense. Il s'appelle Julian, c'est tout ce que je sais sur lui, à part le fait que c'est aussi le fils de mon père... Je ne sais pas comment je dois réagir face à cette découverte...
Une fois de plus, j'arrêtais la caméra, puis observa longuement mon reflet dans le miroir. En effet, je ne mentais pas, je ne savais vraiment pas quoi faire de cette découverte...