Kayleen est née à Londres, mais ses parents sont en fait des Russes. Ceux-ci avaient déménagés à Londres pendant que la future mère débutait sa grossesse. Ce n’est pas qu’ils n’aimaient pas leur pays, c’est juste que c’était le rêve du père d’un jour aller vivre à Londres. Mais la crise économique a frappé, et les parents ne pouvaient plus remonter à la surface, submergés par les dettes. Ils sont donc retournés en Russie alors que Kayleen était toute jeune encore. À l’école primaire, Kayleen avait quelques difficultés. Mais pas des difficultés au niveau académique, c’était plutôt au niveau de la camaraderie. En effet, la petite brune se faisait souvent frapper par ses camarades. Ils la voyaient comme une enfant fragile et prenaient plaisir à lui faire du mal puisqu’elle ne disait jamais rien. Comme elle savait que ses parents avaient déjà beaucoup de problèmes au niveau monétaire, elle ne voulait pas en rajouter et elle ne leur a jamais dit. Kayleen a toujours été comme ça, elle s’occupe des autres, mais pas d’elle-même. De plus, comme elle était dans un nouveau pays, il fallait qu’elle apprenne une autre langue. Elle avait déjà entendu ses parents parler russe auparavant, mais ce n’était pas assez pour qu’elle puisse faire de même. Par contre, avec le temps elle est devenue totalement bilingue.

C’est l’année de ses treize ans que ses parents lui annoncèrent la nouvelle. Ils désiraient retourner à Londres maintenant qu’au niveau financier ça allait beaucoup mieux. Le problème était qu’elle n’avait pas le goût de partir, maintenant que ça allait bien pour elle. Elle s’était fait quelques amis et surtout, elle avait eu la chance de rencontrer quelqu’un à qui elle s’est rapidement attachée. Sa meilleure amie comptait énormément à ses yeux, elles étaient comme des sœurs très soudées. Elle ne voulait pas abandonner tout ça, ça lui avait pris du temps à bâtir. Kayleen appréciait sa vie en Russie, elle ne voulait pas retourner à Londres et devenir la petite nouvelle qui doit tout recommencer à zéro. Et puis, si elle n’arrivait pas à se faire d’amis ? Si son calvaire du primaire recommençait ? Ça faisait peur, très peur. Mais Kayleen n’avait pas le choix, il fallait qu’elle change de pays, qu’elle suive ses parents. Sa dernière journée passée en Russie fut très difficile, elle se sentait mal d’abandonner ainsi sa meilleure amie. Elles s’étaient promis de rester en contact via internet, mais Kayleen ne se faisait pas d’idées… Elle savait que ça ne serait plus pareil par après. Elle se ferait remplacer par une autre, et malheureusement c’est bel et bien ce qui arriva. Les filles qui étaient les meilleures amies du monde s’étaient perdues de vue.

Croyant qu’elle se retrouverait seule à Londres, Kayleen fit une dépression. Mais encore une fois, elle n’en parla pas à ses parents. Ceux-ci n’étant pas très présents car ils travaillaient beaucoup n’y remarquèrent jamais rien. Sans doute pensaient-ils que ce n’était seulement que la période de l’adolescence qui la rendait ainsi. Pendant un an, Kayleen se renferma totalement sur elle-même. Elle était paniquée à l’idée que les autres élèves se mettent à lui lancer des méchancetés ou bien même à l’intimider comme autrefois. Elle ne donnait sa confiance à personne et elle s’isolait du monde carrément. Kayleen ne parla à presque personne de toute sa première année à Londres. Kayleen était certaine qu’elle ne retrouverait jamais une belle amitié comme elle l’avait eue en Russie. Elle se sentait condamnée, prise au piège. C’était comme si le destin lui en voulait, qu’il la punissait.

Ne voulant pas de la pitié des autres et ne voulant pas déranger personne, Kayleen faisait semblant de sourire. Elle faisait comme si tout était parfait, que tout allait bien, mais au fond d’elle ça n’allait toujours pas. Elle n’osait pas du tout en parler à qui que ce soit. Elle avait commencé à parler à quelques personnes et elle s’était fait des amies, mais ce n’était pas pareil. Personne ne la connaissait vraiment, personne ne savait comment elle se sentait au fond d’elle. Et puis, personne ne connaissait aussi bien la Russie ou même le Russe tout court. Elle s’ennuyait de sa meilleure amie, elles ne se parlaient même plus. Avec le temps, les deux jeunes filles n’avaient plus vraiment de choses à se raconter. Leurs conversations étaient de plus en plus courtes et leur contenu était de moins en moins pertinent. Jusqu’au jour où elles ne s’écrivaient juste plus, ça ne servait à rien. Kayleen l’avait abandonnée, elle devait en payer le prix. Ce n’est pas qu’elle n’avait pas essayé d’aller mieux… Kayleen avait même eu un petit copain. Elle l’appréciait, mais il n’arrivait pas à la conforter. Il voyait qu’elle n’allait pas bien, mais il ne savait pas quoi faire pour l’aider puisqu’elle refusait de lui dire ce qui n’allait pas. Il finit par rompre, mais Kayleen était déjà au plus bas, ça ne changea pas grand chose.

Jusqu’au jour où elle se décida d’aller en parler à la psychologue de son école. Celle-ci lui avait fait ouvrir les yeux. Même si elle continuait de s’apitoyer sur son sort ainsi pendant des années, ça ne l’avancerait à rien. Elle devait s’accrocher à quelque chose qui la ferait sortir de cet état. Elle devait avoir des rêves, des buts qu’elle pouvait achever et qui la rendraient heureuse. Kayleen réalisa alors qu’elle pouvait faire ça, elle trouverait la force d’au moins essayer. C’est ce qu’elle fit en postulant pour l’université de son choix, à Londres. C’était une école prestigieuse qui formait les meilleurs dans plusieurs domaines. Kayleen avait désormais de l’ambition et têtue comme elle est, elle ne pouvait s’empêcher de faire ce qui était en son pouvoir pour réussir son but. Même sa mère la supportait là-dedans, elle lui avait promis que si elle était acceptée, elle ferait tout pour qu’elle y reste. Kayleen était de nouveau redevenue elle-même, sans vraiment s’en rendre compte. Elle avait pris goût à la vie et profitait de chaque instant qu’elle passait avec ceux qu’elle aime.

Puis, la récompense arriva. La fameuse lettre d’acceptation, elle l’avait enfin reçue ! Son plus grand rêve se réalisait, là, devant ses yeux. Kaylee était la fille la plus heureuse qui soit. C’était le moment de se bâtir une nouvelle vie et de tout laisser derrière elle. Elle commença sa vie d’étudiante universitaire sur une belle note. Elle souhaitait sincèrement être heureuse.

Elle fit la connaissance de plusieurs nouvelles personnes. Mais l’une d’elle restait un mystère pour elle. Kayleen ne comprenait pas qui était réellement cet Eyden Strauss. Il semblait se cacher derrière un masque. Elle avait entendu parler de lui, et elle ne savait pas ce qu’elle devait en penser. Kayleen n’y portait pas vraiment attention, jusqu’au jour où elle tomba sur lui. Elle rentrait de son emploi, qu’elle avait pris pour aider ses parents à payer ses études, et il était assez tard le soir. Elle marchait dans la rue afin de se rendre chez elle, et c’est là qu’elle le croisa. Il était complètement ivre et il se faisait battre par des garçons aussi bourrés. Eyden avait le visage en sang, mais Kayleen n’eut pas le temps de penser que les gars s’enfuirent. Mais elle ne pouvait pas laisser le garçon là, peu importe sa réputation, c’était inhumain. Ne sachant pas trop quoi faire, elle appela un taxi et l’emmena à l’hôpital. Mais comme il était saoul, il ne se rappelle plus de rien. Kayleen a essayé de lui parler par après, mais à chaque fois elle laissait tomber voyant à quel point il était prétentieux. Pourtant, ce soir-là, il lui avait semblé totalement différent…