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Déjà à mon âge, j'étais ce petit garçon qui courait à droite à gauche. Je faisais partie de ceux que l'on pouvait qualifier d'enfants superactifs. J'étais comme inépuisable, au grand désarroi de mes parents. Je leur menais la vie dure, mais à vrai dire, je n'en avais que faire. J'étais un enfant et ça m'importait peu, je ne me souciais jamais de rien et encore plus lorsqu'on s'appelait Niel Weatherly. D'ailleurs, je détestais ce prénom. Je ne sais pas d'où il vient, sûrement de leur cervelle mal formée, et dans tous les cas je ne voulais pas le savoir. Je ne sais pas comment ils ont pondu ce prénom, et c'est dans ces moments-là que je me dis que jamais je n'appellerais mes enfants d'une manière aussi bizarre et trop recherchée. « Niel, viens. » Comme la plupart des enfants, je faisais semblant de ne pas entendre. Le supermarché était mon lieu de prédilection je dois dire. J'adorais cette endroit, tout simplement parce que j'étais réellement émerveillé de tous ces produits inimaginables, des jouets, des bonbons. J'étais comme au paradis, et c'est d'ailleurs pour cette raison que je ne ratais jamais aucune occasion d'accompagner ma mère là-bas. Ma mère, elle, détestait m'y emmener. C'était relatif au fait que, comme tous les enfants, je voulais acheter mille et une choses, et quand je ne l'obtenais pas, j'étais bien capable de faire un caprice et de me rouler à terre, mettre la honte à ma mère pour qu'elle cède. Parfois ça fonctionnait. Parfois pas. Mais dans tous les cas, je me ramassais une fessée à la sortie. « Mais maman, regarde, c'est Flash McQueen de Cars ! Je peux ? S'il te plaît. » J'étais resté immobile depuis une bonne dizaine de minutes devant un rayon de jouets. Ma mère commençait à s'impatienter sérieusement, elle qui détestait attendre en plus, mais ce qui est certain, c'est qu'elle n'allait pas se laisser faire par un garçon d'à peine six ans. J'étais une vraie plaie, un calvaire. « Non, je t'ai acheté la même voiture en bleue la semaine passée, viens immédiatement. » Elle s'approchait de moi telle une furie et m'empoignait pour me ramener en direction du caddie. Moi qui voulais toujours parvenir à mes fins, je commençais à pousser un long cri, qui s'est fait entendre dans tout le magasin et qui s'est fait retourner tout le monde vers nous. J'aimais aussi attirer l'attention. « Lâche-moiiiiii. » J'avais réussi à qu'elle me lâche, j'avais le poignet rougi mais je n'avais pas tellement mal, j'étais un homme après tout. Je m'encourais partout dans le magasin, ça m'amusait, j'étais mort de rire, ce qui n'était pas le cas de ma maman, mais face à une femme de trente-quarante ans, je n'avais aucune chance de partir bien loin. « Ça suffit un peu, tes caprices, là. » Je soupirais. J'étais vraiment quelqu'un de très énervant.


« alors, les enfants, vous avez réfléchi à ce que vous vouliez devenir plus tard ?  » la femme avait un grand sourire aux lèvres. un sourire niais, forcé, qui était au sommet du ridicule. elle avait ses cheveux magnifiquement coiffés, attachés en chignon dont aucune mèche ne dépassait. elle venait de croiser ses deux mains, probablement pour se donner plus de sérieux, ou même pour encourager les enfants à répondre. cette femme, c'était mon institutrice de primaire. elle voulait propager de la bonne humeur avec son image en paraissant des plus aimables. généralement, c'était le caractère un peu hypocrite des institutrices de gosses : devant les enfants ils sont tout sourire, alors que derrière cette image, c'est limite s'ils ne sont pas dépressifs. personnellement, je m'en fichais un peu, elle était gentille avec moi, et c'était ça le principal, et puis elle donnait bien cours. aujourd'hui, la principale question était notre futur métier. mes autres camarades avaient dû réfléchir beaucoup plus de temps que moi. j'avais déjà ma propre idée, bien évidemment, puisque j'en rêvais depuis bien longtemps. les gars dans ma classe n'était pas réellement matures. en effet, la plupart était encore coincée dans leur rêve de bébé : superhéro. bon, d'accord, à six ans, on avait pas l'esprit évolué, mais cette question avait pourtant un but philosophique. les garçons avaient, la plupart, répondu qu'ils voulaient être policier, ou coureur automobile. parfois, je me demandais comment les filles faisaient pour paraître plus matures que les gars. le professeur se tourna soudainement vers moi. d'un geste tellement inattendu que j'en avais presque sursauté. de ses yeux grands ouverts qui me faisaient limite peur et de son sourire exagéré, elle me posa, d'une voix douce : « et toi niel, qu'est-ce que tu voudrais devenir plus tard ?  » je levais la tête vers elle, plein de fierté et avec un énorme sourire accroché aux lèvres. j'étais tellement heureux de partager cette idée avec mes camarades, surtout que, d'après moi, mon idée de métier était bien mieux que celles des autres sans aucune prétention. j'avais de l'ambition, de l'avenir, et je ferais tout pour que ça arrive. « moi, je veux être musicien.  » sincèrement, je pensais avoir impressionné les autres avec mon idée, mais apparemment ce n'était pas le cas puisqu'il y a eu un fou rire général de la part des autres de la classe. les traits de mon visage s'assombrirent soudainement, peu à peu, jusqu'à ce que des larmes perlèrent sur mes joues rosées. l'institutrice avait l'air d'avoir pitié de moi puisqu'elle avait crié un bon coup aux autres de se taire. je me sentais nul, c'était mon rêve le plus cher, et tout le monde se moquait de moi parce que d'après eux, c'était bien mieux de devenir un superhéro qu'un musicien. je m'en fichais, je n'abandonnerais pas comme ça, je veux devenir musicien, et ce n'est pas leurs moqueries qui m'arrêteront.

« niel, j'me casse. » je tournais ma tête d'un mouvement brusque vers mon meilleur ami avec de gros yeux. lui essayait de garder son sérieux. « fais pas cette tête! en fait j'suis envoyé à londres. » j'avais du mal à voir s'il se foutait de ma gueule ou si il était réellement sincère. le connaissant, la première hypothèse aurait été vraiment possible. « ah non mais rien à faire, j'te suis hein! » luan c'était mon meilleur ami d'enfance, et mon meilleur ami tout court. j'pouvais pas le laisser comme ça, s'en aller sans que je ne dise quoi que ce soit. je le suivrais n'importe où, même si le monde en dépendant. en l'occurrence c'est londres.